La CNIL utilisée par le maire UMP de Puteaux pour restreindre la diffusion du conseil municipal
mercredi 09 juillet 2014
Comment le maire UMP de Puteaux utilise la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) pour empêcher les citoyens de prendre connaissance des débats houleux au conseil municipal :
La loi prévoit que chacun peut assister aux séances du conseil municipal et a le droit d'enregistrer ces dernières par tous les moyens : image, son ou film.
Article L2121-18 du Code général des collectivités territoriales :
"Les séances des conseils municipaux sont publiques".
"Ces séances peuvent être retransmises par les moyens de communication audiovisuelle".
Les élus ne peuvent invoquer le droit à l'image pour interdire la diffusion de ces images, puisqu'ils se trouvent à ce moment là dans l'exercice de leurs fonctions. La raison en est simple : les débats d'une assemblée démocratique doivent être accessibles le plus largement possible. C'est le principe de "publicité" des séances. Chaque citoyen doit savoir ce qui est voté et qui vote quoi.
Pourtant, un certain nombre de maires tentent de limiter cette obligation républicaine de transparence. C'est le cas à Puteaux, où le maire Joëlle Ceccaldi-Raynaud a fait voter par sa majorité, le 3 juillet 2014, des dispositions limitant ce droit :
"L'enregistrement ou la retransmission (du conseil municipal) ne peuvent être effectués sans que (1) le maire en ait été préalablement informé et (2) que les obligations déclaratives aient été effectuées auprès de la CNIL", indique le nouveau règlement intérieur du conseil municipal de Puteaux voté par les élus UMP.
Cet extrait du réglement me semble contenir des conditions dépassant le cadre de la loi :
1/ L'enregistrement ou la retransmission du conseil ne peuvent être soumis à une déclaration préalable :
La déclaration préalable ne s'apparente-t-elle pas ici de fait à une autorisation préalable, puisque la rédaction de l'article sous entend que si le maire n'était pas prévenu (sous quelle forme et dans quel délai ?), il pourrait exercer son pouvoir de police de l'assemblée et ne donnerait pas les moyens de filmer (sur un "emplacement réservé à cet effet)". Or dans un jugement en date du 5 mai 2008, le tribunal administratif de Nice précise que « I’enregistrement audiovisuel ne peut pas être soumis à un régime d'autorisation préalable ». Cela vaut pour les citoyens comme pour les élus : la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, dans un arrêt du 3 mai 2011, indique que « le règlement intérieur de l'assemblée municipale ne saurait soumettre l'utilisation par les conseillers municipaux des moyens d'enregistrement audiovisuel à autorisation préalable alors que ce régime d'autorisation préalable ne résulte d'aucun texte de nature législative ou réglementaire ». Si un citoyen est libre de filmer l'assemblée sans en demander l'autorisation au maire, il ne peut - et encore moins - être empêché de le faire s'il ne l'a pas prévenu !
2/ L'enregistrement et la retransmission du conseil municipal par un citoyen entre-t-il dans le cadre des déclarations obligatoires à faire auprès de la CNIL ?
Je ne vois pas pourquoi l'enregistrement devrait faire l'objet d'une déclaration préalable à la CNIL, puisque rien n'indique préalablement que le fichier sera conservé ou qu'il n'aura pas d'autre utilisation que personnelle, donc non soumise à la déclaration prévue par la Loi informatique et libertés sur le traitement des données.
La diffusion pourrait l'être, mais comme celle-ci se fait le plus souvent sur des sites comme Youtube ou Dailymotion, qui répondent déjà à toutes les obligations de déclaration et d'information du public imposées par la loi, une déclaration à la CNIL est-elle nécessaire ou même possible par son auteur : le fichier n'est plus matériellement en possession de l'auteur, mais du diffuseur : Youtube ou Dailymotion...
Voir les mentions légales sur le site DAILYMOTION : "Dailymotion a déclaré la collecte et le traitement de vos données personnelles auprès de la CNIL (récépissé nº 1164929)".
Enfin, la loi sur la Presse et le Code des Collectivités peuvent-ils être limités par la loi Informatique et libertés pour ce cas ?
Et pour conclure, le règlement intérieur de la ville de Puteaux est-il légal ?
Si vous êtes juriste merci de nous éclairer !
Vous pouvez laisser un commentaire ci-dessous ou m'écrire : grebert (at) gmail.com
Ces conditions imposées par le maire de Puteaux ne visent qu'une chose : empêcher les citoyens de filmer les séances. Parce que ces enregistrements, une fois rendus publics, montreraient à quel point la majorité municipale se comporte mal. Un maire démocrate ne devrait pas multiplier les obstacles à l'exercice d'un droit. Il devrait au contraire le faciliter. A Puteaux, nous avons la démonstration inquiètante d'un maire qui veut empêcher une liberté pourtant toute simple.
Christophe Grébert
Extrait : échange entre le maire Joëlle Ceccaldi et son père, Charles Ceccaldi, ancien maire
Scene de famille au conseil municipal de Puteaux par grebert
(cet article sera complété au fur et à mesure que je trouverai des informations sur le sujet)