Un collège privé à Puteaux pour la rentrée 2012
lundi 27 juin 2011
La décision prise par le diocèse des Hauts-de-Seine d’ouvrir un collège privé à Puteaux (rue Edgar Quinet, sur le haut de la ville) est une excellente nouvelle pour les habitants de notre ville. Ce nouvel établissement ouvrira à la rentrée 2012. Il comprendra 12 classes, soit environ 360 élèves. Il sera associé au collège Saint-Pierre-Saint-Jean de Neuilly, et accueillera en priorité les enfants des écoles de Puteaux et de Nanterre.
Le projet aurait pu se faire ailleurs. C’est Puteaux qui a été choisi. Non que la ville ait fait quelque cadeau que ce soit : le terrain lui appartient et est loué sous forme d’un bail emphytéotique. Ce qui veut dire que dans 30 ans, Puteaux pourra en renégocier le loyer. Entre temps, une école sera construite et financée. Ce n’est pas rien…
L’évaluation faite par les Domaines du loyer ayant été un peu supérieure aux prévisions du diocèse (compte-tenu de la charge de l’emprunt pour la construction du collège), la ville de Puteaux a emporté la décision en consentant un abattement final de 10% sur le loyer : cette réduction, légale, est classique et manifeste le choix politique d’une collectivité en faveur de la diversité scolaire. Pour nous qui ne sommes pas suspects de complaisance envers la majorité de notre ville, il n’y pas ici trace d’un problème.
Cette décision est une chance pour Puteaux et vient réveiller une offre scolaire dominée depuis 30 ans par une importante diaspora sur les établissements, publics et privés, des villes voisines.
Historiquement, notre ville s’est toujours plus intéressée aux jeunes sous l’angle des loisirs que sous celui de la réussite scolaire. C’est ainsi. Elle en a payé un lourd tribut, notamment sous la forme d’écolage aux villes voisines. Les Putéoliens aussi : climat de défiance, appauvrissement de la diversité sociale, accentuation des écarts réels ou présumés entre les écoles et les villes… A tort ou à raison ? On ne tranchera pas la question, mais les résultats finaux du lycée Agora de Puteaux, parmi les derniers de la région, ne sont à ce jour pas de nature à inverser la situation.
Gardons-nous de laisser revenir les vieilles sirènes de la laïcité. L’originalité, et la richesse, de l’école à la française est sa diversité. La liberté du choix qui en résulte est inscrite dans notre constitution. Elle manquait à Puteaux. C’est bientôt chose faite…
On reproche à l’école privé son coût pour la collectivité. C’est un mauvais procès. D’abord parce que l’école privée prend à sa charge l’investissement immobilier et les dépenses afférentes à son « caractère propre » : l’ensemble représente en moyenne 400 euros portés par chaque élève pour une année. Si le reste est pris en charge, comme le stipule la loi Debré, par le Conseil Général et l’Education nationale, c’est parce qu’il relève de la mission publique d’enseignement général. Il faut savoir qu’un élève du privé coûte 2 fois moins cher qu’un élève du public : parce que l’investissement est autofinancé sur les fonds propres du privé ; parce que les parents du privé soutiennent aussi le public par leurs impôts ; et surtout parce que les forfaits scolaires payés par les collectivités territoriales (villes et/ou Conseil Général) traitent beaucoup moins bien les écoles du privé. Il faut cependant être honnête : ce n’est pas le cas à Puteaux.
On reproche aussi à l’école privé son élitisme par l’argent et par la sélection.
L’argument de l’argent a fait long feu depuis longtemps : les familles modestes qui font le choix de l’enseignement privé sont légion. Les collèges privés ne font pas de marge : ils facturent l’investissement, le caractère propre, les forfaits scolaires décotés, la cantine sur laquelle ils ne bénéficient pas d’aide comme dans le public. Nul n’ignore en plus les efforts de solidarité développés par le privé pour ne pas faire de l’argent le ressort de leur sélection.
L’argument de la sélection ensuite : c’est vrai que les établissements privés ont dans l’ensemble de meilleurs résultats. On peut se poser sans fin la question de savoir si la sélection est bonne pour l’enfant ou pour l’établissement. Toujours est-il que les sondages ne s’y trompent pas : les familles préfèrent les écoles qui réussissent. Et que le privé a fait, ces dernières années, d’énormes efforts d’accompagnement avec leurs jeunes en échec scolaire…
Regardons maintenant l’effet de stimulation attendu de ce nouveau collège : en affirmant porter un projet d’établissement novateur et social, il ouvre des perspectives nouvelles aux familles et laisse espérer à la fois une amélioration générale du niveau scolaire et une sédentarisation des élèves sur la ville. Tout le monde doit y gagner : la diversification de l’offre scolaire est souvent synonyme d’émulation. La concurrence peut encourager les écoles publiques à l’excellence. Les bénéfices attendus pour la collectivité locale ne font aucun doute…
Il reste pour Puteaux à finir ce qui n’est pas achevé, car la création d’un établissement privé ne corrige pas à elle toute seule les défauts de l’ensemble. Il faut à présent passer d’une culture du tout-loisir à celle d’une excellence éducative, et se recentrer enfin sur une amélioration de la qualité réelle de notre offre à la jeunesse. Distribuer des fournitures scolaires en début d’année et offrir des voyages exceptionnels n’est pas le tout d’un projet éducatif. Des places en crèche à un équipement informatique scolaire individualisé, des aides linguistiques adaptées aux besoins à des soutiens scolaires efficaces et évalués, le chemin de restauration de la confiance avec les parents, les éducateurs et les acteurs de l’éducation est encore long…
L’habitude locale d’ancrer tout projet dans le « cadeau » multiplie les initiatives gadget et leur communication, et entrave la mise en route de réformes structurelles. Pour choisir le fond sur la forme, préférer le long au court terme, privilégier l’autonomie responsable à la mise au pas directive, il faudra sans doute attendre les élections municipales de 2014.
Nous serons au rendez-vous et, en attendant, c’est avec intérêt et sympathie que nous suivrons l’évolution de notre nouveau collège.
Sylvie Cancelloni
Conseillère municipale d'opposition