Le règlement intérieur du conseil municipal de Puteaux ne permet pas le bon fonctionnement de la démocratie locale
samedi 31 mai 2008
Lu sur www.grebert.net :
Lors du conseil municipal du mercredi 4 juin 2008, les élus de Puteaux sont à nouveau appelés à se prononcer sur leur règlement intérieur. Celui-ci doit fixer la manière dont nous allons travailler durant toute la mandature, jusqu'en 2014. Cette discussion est donc très importante, puisque de la qualité de ce texte -qui compte 30 articles - dépendra la bonne marche de la démocratie locale. Or sur plusieurs points, nous nous inquiétons et nous demandons les améliorations / précisions / modifications / corrections suivantes :
- Sur la convocation (Article 2, page 4) :
Le maire convoque les élus "5 jours francs" avant la date du conseil. C'est le minimum légal. Mais ce minimum est insuffisant pour les minorités qui doivent disposer d'assez de temps pour examiner les dossiers et préparer leurs interventions. Nous proposons de prolonger ce délais à "7 jours francs".
Pour faciliter le travail des élus, nous demandons également que les dossiers accompagnant l'ordre du jour soient envoyés par courrier électronique.
- Sur la retransmission du conseil (Article 9, page 8) :
"Les séances peuvent être retransmises par les moyens de communication audiovisuelle (article L.2121-18 alinéa 3 du Code des Collectivités). Néanmoins, ces retransmissions ne peuvent porter atteinte, ni à la sérénité des débats, ni au droit à l'image de toute personne présente".
Cette dernière phrase est contraire à la loi : le conseil municipal est une assemblée publique et les élus ne peuvent invoquer leur droit à l'image, cela au nom de la liberté d'informer. L'article 9 du code civil n'est pas valable ici. Tout citoyen doit pouvoir librement enregistrer le conseil municipal et le diffuser. Il suffira d'indiquer aux personnes venant assister au conseil de ne pas se mettre dans le champ de la caméra et aux personnes qui filment de ne filmer que la salle du conseil.
Nous demandons par ailleurs une diffusion intégrale et en différé du conseil sur le site internet de la municipalité.
- Sur l'utilisation d'ordinateurs portables par les élus (Article 10, page 9) :
"Les ordinateurs portables sont autorisés, sous réserve toutefois que les élus ne s'en servent pas pour communiquer avec l'extérieur via Internet (et) que ces ordinateurs fonctionnent sur batterie pour éviter tout branchement électrique dans les travées".
Cette demande date d'un autre temps. Les élus doivent pouvoir utiliser les outils modernes. L'usage de l'ordinateur et du net se généralise dans l'entreprise, à l'école et dans tous les lieux publics. Cette utilisation devient mobile grâce au wifi et à la 3G. Seul le conseil municipal de Puteaux échapperait à cette évolution ? Nous demandons la suppression de ce paragraphe qui ne répond à aucune nécessité et qui n’est pas justifiée. Au contraire, l'utilisation du net peut permettre à l'élu d'obtenir très rapidement un document dont il aura besoin en fonction de l’avancement des débats.
Nous suggérons par ailleurs à la municipalité d'équiper chaque élu d'un ordinateur portable, avec un accès internet, une adresse email. Un intranet des élus regroupant archives, dossiers, convocation, agenda, courriers pourrait être également créé.
- Sur les débats ordinaires (Article 12, page 10)
Nous proposons la rédaction suivante de l’alinéa B : « Lorsqu’un membre du conseil municipal s’écarte de la question en discussions ou qu’il trouble le bon déroulement, le maire peut lui retirer la parole ou l’inviter à conclure très brièvement ».
- Sur les questions orales (Article 16, page 11) :
Les groupes peuvent poser des questions écrites (appelées ici curieusement "questions orales") auxquelles le maire répond à la fin du conseil municipal. Le nombre de ces questions est limité à "3 par séance et par groupe".
Certaines questions peuvent être traitées en quelques phrases. D'autres plus complexes demandent une réponse plus longue. Nous proposons de porter le nombre de questions à 5 par groupe. Le conseil municipal doit être un lieu d'échanges et d'informations, pour les élus et les citoyens. Ce moment est primordial.
Nous proposons que les « questions orales » soient lues par les élus.
- Sur le Procès Verbal de la séance (Article 21, page 13 et 14) :
Le "Procès Verbal", c'est à dire le compte rendu de la séance du conseil, tel qu'il est prévu dans ce projet de règlement est très insuffisant. Il ne contiendra notamment aucune retranscription des débats. Dans une ville moderne et valorisant la démocratie de proximité, chaque citoyen doit pouvoir prendre connaissance des décisions prises et des débats du conseil municipal. Le compte-rendu des séances doit être par conséquent le plus complet possible. Il doit au minimum indiquer le vote des élus de manière nominative, ainsi que les explications de vote des élus qui expriment ce souhait. Une retranscription intégrale des débats devrait être la norme.
- Sur l'ensemble du titre 6 concernant les commissions municipales et extra-municipales (Articles 22 et 23, pages 14 à 17) :
La démocratie représentative fonctionne avec une majorité et une opposition. Sur ce principe, chaque commission - et pas seulement pour celles où la loi l'impose - doit être ouverte à l'opposition. De même dans le cadre de la démocratie participative, le mode de désignation des membres des commissions ne devrait pas relever uniquement du maire et de sa majorité. Les minorités doivent être représentées.
- Sur la mise à disposition de locaux à l'opposition (Article 25, page 18) :
"Il est mis à disposition des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale un local commun (..). Ce local ne saurait en aucun cas être destiné à une permanence ou à accueillir des réunions publiques".
L'opposition doit disposer de tous les moyens nécessaires pour travailler. Cela signifie la mise à disposition d'un local pour chaque groupe, avec une ligne téléphonique, un ordinateur avec accès à Internet, une imprimante, une photocopieuse, des moyens de secrétariat, la possibilité de recevoir des RDV et de tenir des réunions. Ce local doit être accessible à tout moment et librement. Les élus doivent pouvoir recevoir des citoyens putéoliens dans ce local.
- Sur la tribune de l'opposition dans le journal municipal (Article 26, page 18) :
"Il est mis à disposition des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale un espace d'expression d'une 1/2 page dans le bulletin municipal Puteaux infos".
La loi prévoit - sans le préciser quantitativement - qu'un espace doit être réservé à l'opposition dans le magazine municipal. Une 1/2 page nous semble insuffisant. Puisque cette moitié de page sera divisée en 3, soit 1/6 de page par mois et par tendance politique pour s'adresser aux Putéoliens. Nous demandons qu'une page entière soit consacrée à la rubrique "Tribune de l'opposition".
Par ailleurs, nous demandons la création d'une rubrique "Tribune de l'opposition" sur le site internet municipal, conformément à la jurisprudence désormais établie qui considère les sites municipaux comme une publication.
Dans un alinéa "C" de cet article 26, il a été ajouté la phrase suivante : "Le directeur de publication peut demander toute modification ou suppression des textes s'il estime que ceux-ci portent atteinte aux personnes ou sont contraires aux règles de bonnes moeurs".
Le directeur de publication de "Puteaux infos", qui est en l'occurrence un conseiller municipal de la majorité, n'a pas à juger du bien fondé du contenu d'une tribune de l'opposition dont la publication lui est imposée par la loi. Seule l'opposition est responsable de ce contenu et a le cas échéant à en répondre devant la justice, conformément à la loi sur la liberté de la Presse.
Cette position correspond à la jurisprudence actuelle rappelée par le gouvernement en octobre 2007 en réponse à une question d'un membre du Sénat :
La cour administrative d'appel de Versailles, dans sa décision du 8 mars 2007 n° 05VE021 12, a considéré que le projet de tribune, rejeté par l'adjoint au maire en tant que directeur de publication, ne présentait pas un caractère outrageant de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération des personnes publiques mises en cause, que son contenu n'avait pas un caractère diffamatoire ou injurieux qui aurait été de nature à faire obstacle au droit d'expression des élus de l'opposition consacré par l'article L. 2121-27-1, et que, dans ces conditions, le directeur de publication qui avait au demeurant la possibilité d'assortir cette tribune d'un article rectificatif pour démentir les faits qu'il considérait comme inexacts, ne pouvait pas faire valoir l'éventuelle mise en jeu de sa responsabilité pénale sur le fondement des dispositions de l'article 42 de le loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse pour justifier un tel refus.
S'agissant de l'hypothèse où un article présenté par des conseillers d'opposition paraît méconnaître les règles susvisées et, pour répondre au souci de dégager la responsabilité du directeur de publication, il convient de remarquer que la Cour de cassation a justifié une décision juridictionnelle relaxant les directeurs de publication qui, sous la rubrique « annonces légales », avaient fait paraître une décision disciplinaire considérée par l'intéressé comme diffamatoire, alors que la publication de l'annonce litigieuse avait été faite sur une réquisition visant un article législatif du code de la sécurité sociale. La cour a précisé que la décision attaquée « se trouve justifiée, dès lors que le directeur de publication d'un journal ne saurait encourir aucune responsabilité du fait de l'insertion d'une annonce dont il ne peut légalement se dispenser » (Cass. Crim., 17 octobre 1995, n° de pourvoi 93-85440).
Ce précédent jurisprudentiel pourrait être invoqué, le cas échéant, si un directeur de publication devait être mis en cause pénalement pour des écrits produits par les conseillers minoritaires, malgré une demande de modification. En cas d'injure ou de diffamation, les poursuites peuvent être limitées à la personne qui a tenu de tels propos. La mention, dans le bulletin, de l'obligation légale de réserver une tribune d'expression aux conseillers minoritaires et de la responsabilité des auteurs des articles quant à leur contenu serait de nature à clarifier les obligations respectives du directeur de publication et des conseillers concernés.
Nous demandons par conséquent la suppression de cet alinéa. Seul l'article L.2121-27-1 du code des collectivités doit être rappelé dans notre règlement intérieur.